Situation socio- politique au Togo : Des prêtres exigent un débat sur la position de l’Eglise catholique

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« Même si l’Eglise ne peut pas être muette sur les grands sujets qui rythment la vie d’une Nation, il est important qu’elle garde à l’esprit le principe de neutralité dans ses prises de position », dixit, père Jean-François

Du 7 au 12 janvier 2019 se tient à Kpalimé l’Assemblée Générale des prêtres catholique du Togo. Pour l’occasion, le père Jean-François, du nom de ce prêtre qui n’a voulu dévoiler publiquement sa vraie identité et qui avait fait parler de lui en novembre de l’année dernière en dénonçant dans une lettre ouverte, le comportement du père Afognon, s’est encore une fois adressé à sa hiérarchie.

Dans une autre lettre intitulée « Lettre ouverte à la grande communauté des prêtre catholique du Togo à l’occasion de l’assemblée générale de Kpalimé », il demande et ceci, au nom d’autres prêtres, un débat pour clarifier la position de l’Église Catholique du Togo dans le débat politique.

« Très Révérends Pères de l’Eglise Catholique du Togo, l’Assemblée Générale est une opportunité divine qui s’offre à nous pour discuter des sujets relatifs à la vie pastorale et aux œuvres eucharistiques dans notre communauté. Et comme nous le savons tous, notre pays le Togo traverse depuis un temps une crise politique qui, à un moment donné, a amené l’Eglise à se sentir interpelée. Et nos Pères Evêques ont senti la nécessité de lancer un appel pressant même si cet acte n’a pas obtenu l’adhésion globale de tous les Prêtres. Et comme je l’ai souligné et défendu dans une précédente lettre, il ne serait pas superflu de rappeler que même si l’Eglise ne peut pas être muette sur les grands sujets qui rythment la vie d’une Nation, il est important qu’elle garde à l’esprit le principe de neutralité dans ses prises de position ; ceci pour mériter la crédibilité des acteurs politiques de tout bord au cas où ceux-ci venaient à la solliciter en dernier recours pour concilier les positions », lit-on dans la correspondance.

Visiblement, ils sont nombreux ces prêtres à dénoncer l’immixtion parfois partisane de l’Église catholique du Togo dans le débat politique dans le pays.

« Depuis que nous avons publié notre lettre en novembre dernier, il y a eu plusieurs occasions au cours desquelles, certains de nos confrères ont tenté d’aborder le sujet, notamment au cours des réunions diocésaines et presbytérales à Lomé et à Kpalimé.

Mais à chaque fois, le Père Archevêque de Lomé, le Père Évêque de Kpalimé et certains responsables diocésains ont catégoriquement refusé qu’il y ait une discussion autour de cette question », a confié le prêtre, lorsque la rédaction du site a tenté d’en savoir un peu plus sur ses sorties.

Tout en refusant de s’afficher publiquement, le père Jean-François dit connaitre les raisons qui font fuir le débat par sa hiérarchie.

« La raison de cette attitude est toute simple : ils savent que tout le monde n’adhère pas à la façon dont l’Eglise Catholique s’immisce dans les affaires politiques du pays », ajoute-t-il dans nos échanges.

L’on attend de voir si la préoccupation de ce prêtre sera prise en compte par l’Assemblée Générale ou pas.

En tout état de cause, ces sorties du père Jean-françois démontre à suffisance à quel point l’Eglise Catholique du Togo est profondément divisée sur la situation socio-politique au Togo et particulièrement sur le comportement même de certains responsables du clergé qui n’hésitent pas à s’aligner derrière l’opposition notamment la C14.

L’initiative prise il y a quelques semaines par certains d’entre eux, d’aller rencontre le président Ghanéen, Akufo-Addo, l’un des facilitateurs dans le dialogue politique, afin de demander à ce dernier de mettre la pression sur le pouvoir togolais pour que les élections législatives du 20 décembre soient reportées en est une preuve indéniable du soutien d’apporte le clergé à la C14. Malheureusement, ils n’ont pas eu gain de cause.

Certaines indiscrétions font état de ce que le père Afongnon qui a créé l’association « Espérance pour le Togo » et qui se réclame de la société civile, prêcherait pour les prêtres opposants au régime de Faure Gnassingbé. Il serait soutenu dans sa démarche par Monseigneur Philip Fanoko Kpodzro, qui a fait des sorties intempestives pour afficher clairement son opposition au régime de Faure Gnassingbé.

Voici l’intégralité de la lettre du père Jean-François

LETTRE OUVERTE A LA GRANDE COMMUNAUTE DES PRETRES CATHOLIQUES DU

TOGO A L’OCCASION DE L’ASSEMBLEE GENERALE DE KPALIME

Très Révérends Pères de l’Eglise Catholique du Togo,

Dans quelques jours se tiendra notre Assemblée Générale à KPALIME. Cet évènement m’offre l’occasion de venir une fois encore partager avec vous, les préoccupations liées à la bonne marche de notre mission de conduire le peuple de Dieu.
Avant toute chose, je remercie Dieu le Père Tout Puissant d’avoir permis à ses enfants que nous sommes d’entrer dans cette nouvelle année en pleine santé et j’implore sa miséricorde sur l’humanité toute entière. Je rends également grâce à Dieu pour son omniprésence et son assistance permanente à travers l’Esprit Saint qui illumine ses serviteurs que nous sommes, spécialement nos Evêques, dans la lourde charge de conduire les hommes et femmes de notre communauté.
Que la grâce et la clémence de Dieu parrainent notre Assemblée Générale, ce rendez-vous important du clergé catholique de notre pays qui se tiendra cette année du 7 au 12 janvier 2019.
Très Révérends Pères de l’Eglise Catholique du Togo, l’Assemblée Générale est une opportunité divine qui s’offre à nous pour discuter des sujets relatifs à la vie pastorale et aux œuvres eucharistiques dans notre communauté. Et comme nous le savons tous, notre pays le Togo traverse depuis un temps une crise politique qui, à un moment donné, a amené l’Eglise à se sentir interpelée. Et nos Pères Evêques ont senti la nécessité de lancer un appel pressant même si cet acte n’a pas obtenu l’adhésion globale de tous les Prêtres. Et comme je l’ai souligné et défendu dans une précédente lettre, il ne serait pas superflu de rappeler que même si l’Eglise ne peut pas être muette sur les grands sujets qui rythment la vie d’une Nation, il est important qu’elle garde à l’esprit le principe de neutralité dans ses prises de position ; ceci pour mériter la crédibilité des acteurs politiques de tout bord au cas où ceux-ci venaient à la solliciter en dernier recours pour concilier les positions. Depuis que cet appel a été lancé, il y a eu des tentatives initiées de part et d’autre par certains confrères pour qu’un débat sincère soit ouvert sur le rôle et la responsabilité de l’Eglise Catholique face à un peuple pris en otage du fait des querelles de ses hommes politiques. Mais de toute vraisemblance, notre hiérarchie n’a pas trouvé que le moment était propice à un tel débat. Si la tension politique qui prévalait à cette époque pouvait justifier une telle position de la hiérarchie catholique, le contexte actuel permet de poser publiquement le débat, sans circonspection, pour que de façon définitive soit déterminé le rôle de l’Eglise dans le débat politique au Togo. Dans cette perspective, l’Assemblée Générale est le cadre le plus propice à de telles discussions. Il serait donc regrettable, à mon avis, que ceux qui se sont jusqu’à ce jour opposés à la tenue d’un tel débat, tentent encore de le faire à l’occasion de cette Assemblée Générale. C’est pourquoi j’exhorte tous les Prêtres à un élan de solidarité à l’endroit des confrères qui demandent déjà que la parole soit libérée lors de l’Assemblée Générale pour permettre à tout un chacun de s’exprimer librement sur ce sujet pour mettre fin à la cacophonie et parvenir à une position concertée de l’Eglise catholique du Togo sur la situation politique du pays.
En espérant que l’ensemble des Prêtres recevront de façon favorable cet appel, je vous prie d’agréer, très Révérends Pères, l’expression de mes salutations respectueuses.

Lomé, le vendredi 04 Janvier 2019

Votre dévoué, Père JEAN-FRANÇOIS

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